Toi aussi tu imagine mal Cunégonde et Godefroy en plein acte charnel, cachés derrière un arbre comme des adolescents d’aujourd’hui ? Pourtant le sexe médiéval existe, et les images pornographiques aussi !
Alors, le sexe à l’an mil de notre ère, c’était comment ?
Les hommes prennent les choses en mains.

Ça, ce n’est pas une idée reçue, les femmes n’ont toujours pas mainmise sur leurs propres corps. Les mecs décident de tout, ou presque. Pour eux, la femme parfaite a … 15 ans.
Le physique de l’adolescente doit répondre à certains critères : Elle doit avoir de beaux cheveux blonds, des seins bien ronds, des lèvres vermeilles, et une croupe de jument. Ajoutez à cela que la beauté intérieure ne peut pas “rattraper” le physique ingrat de la jeune fille, car logiquement : “Si t’es moche de l'extérieur, t’es moche de l’intérieur”.
Le flirt est également le privilège de l’hommes, même s’il veille à rester discret dans ses caresses. L’ombre de l’Eglise plane au dessus des amoureux et punit sévèrement le péché de chair. Quand à la demoiselle, gare à elle ! Si elle joue la séductrice, elle risque une réputation de dévergondée.
Dieu veille au grain.

Le clergé dirige tout, y compris ce qui se passe sous la couette. En suivant le calendrier chrétien, monsieur et madame de Montmirail peuvent faire l’amour seulement … un tiers de l’année. D'après certains pénitentiels carolingiens, il est interdit de forniquer 250 jours de l'année. Oui, on ne va tout de même pas avoir un coït la veille d’une fête sainte ! Ces mesures ne doivent pas être frustrantes, elles sont là pour protéger les pauvres pêcheurs du diable en personne, et comme l’abstinence est mère de sûreté, mieux vaut renoncer au plaisir, juste au cas où.
Quand les amoureux sont autorisés à procréer, l’Eglise met en place des règles concernant la position des amants. Sans surprise, c’est le missionnaire qui l’emporte, l’homme dessus, la femme dessous : la base. Oubliez toutes les excentricités : interdiction de faire l’amour debout, car c’est mauvais pour la santé de l’homme, et bien sûr, dites adieu à notre bien aimée more canino ou levrette, jugée trop bestiale.
On peut quand même faire des exceptions; ainsi la femme enceinte peut chevaucher son mari (si monsieur est d’accord pour se mettre dans une position aussi humiliante bien sûr).
Pour garder les hommes dans le droit chemin, l’Eglise utilise la peur. La femme est dépeinte comme une créature diabolique. N’oublions pas que le péché originel fut commis par une F.E.M.M.E. Depuis cet épisode regrettable - Ève entraînant la chute d’Adam avec une pomme- les mecs de l'Eglise se sont jurés de punir les créatures maléfiques que sont les nanas. Odon de Cluny, abbé du Xème siècle aurait même désigné la femme comme "un sac de fientes". Sympa.
Évidemment, durant la longue période du moyen-âge - seulement mille ans- l’Eglise a fait évoluer son discours. C’est pas des monstres quand même.
Si dans un premier temps les “péchés de chairs” sont punis de sentences aussi extravagantes que l’enterrement vivant ou le bûcher, on voit un réel adoucissement des peines vers le XIème siècle. C’est à ça que servent les psaumes finalement. Tu couches avec la sœur de ta femme ? Vilain garçon, récite les sept psaumes de la pénitence et Dieu fermera les yeux.
Les prostituées.

Narquoisement, les prêtres eux même fréquentent les bordels. Eh oui, “Dans chaque église, il y-a toujours quelque chose qui cloche”. Ici par exemple, un jeune moine dîne chez un couple sympathique, mais pendant que l'homme de la maison va à la prière, le religieux finit au lit avec sa femme.
On voit même apparaître au XIIe siècle, dans les grandes villes, une prostitution organisée, mise en place par les responsables de l’ordre public (seigneurs, abbés, évêques... ). La prostitution est alors considérée comme un moindre mal.
Thomas d’Aquin - théologien et philosophe religieux au XIIIe siècle - ira jusqu’à dire : “Cela sent mauvais, mais sans elle(s), c’est partout dans la maison que cela sentirait mauvais.”
Les prostituées jouent un rôle de balancier, essentiel pour la société médiévale. Grâce à elles les jeunes hommes seront moins enclins à se tourner vers l’homosexualité, les viols seront limités car l’agressivité sexuelle des hommes canalisée. Pour certains, les femmes doivent enjoindre leurs maris à fréquenter les bordels, si cela peut leur éviter certaines pratiques sexuelles considérées comme de graves péchés (encore une question de levrette).
Et Quid du clitoris dans tout ça ?
Lol.
Si Hippocrate, 300 ans avant JC avait déjà compris que le clitoris était le siège du plaisir de ces dames, au moyen-âge on préconise le sexe pour la procréation, pas pour l’orgasme féminin !
On ne s’amuse pas vraiment à lever les jupes des dames pour étudier en détail le bénitier qui s’y cache. La grande théorie qui fait fureur à l’époque est celle de la symétrie. Le vagin reproduit la forme du pénis, en creux.
Les mecs se foulent pas : Si le gland est la source du plaisir pour l’homme, forcément, celle de la demoiselle se trouve au niveau du col de l'utérus. Ça coule de source voyons.

D'après les esprits scientifiques de l'époque, la femme est molle, humide, froide, fragile et ouverte, plus proche des animaux que l'homme. On estime que si elle n'a pas de rapports sexuels assez fréquemment, elle devient hystérique. Au contraire, on préconise la retenue chez ces messieurs, car l'orgasme demande un effort important, il équivaut à deux saignées ! L'abus de coït est dangereux : il provoque le dessèchement des yeux, une réduction du cerveau et des éjaculations sanglantes , mais attention, l'abstinence complète entraîne l'empoisonnement de l'organisme, il faut donc trouver un juste équilibre.
Le sperme, cette "vie à l’état liquide", est l’extrait le plus pur du sang, on estime qu'il provient des régions cervicales et oculaires de l'individu. Il est si précieux que les rapports non procréatifs (sodomie, masturbation, etc) sont sévèrement punis.
Les images érotiques

Au XIIIème siècle, on observe une grande diversité des enluminures à caractère sexuel, dues à la diffusion croissante des images. Les manuscrits les plus célèbres en ce sens sont certainement le Roman de la rose et le Psautier de Gorleston (XIVème siècle). Le Roman de la Rose, roman courtois par excellence, cache bien son jeu. Ou plutôt non, il ne cache rien du tout ; on y voit par exemple des nonnes cueillir des pénis dans un arbre à verges, subtil.
Ici un homme exhibe son anatomie tout en désignant ses fesses du doigt (Psautier de Gorleston). L'image d'un homme offrant une bague à sa bien aimée peut sembler anodine (Psautier d'Ormesby), pourtant l'épée qui se dresse hors de son vêtement est un symbole phallique évident. La jeune femme porte un écureuil : encore une fois oubliez l'image d'un rongeur innocent, puisqu'il désigne au moyen-âge, le sexe de monsieur.
Regardez le gros chat qui s'apprête à entrer dans le trou de la souris, là encore, le sous-entendu est évident !
Bonus
Vous êtes en manque d’inspiration pour désigner la chose ? Piochez parmi ces jolies expressions médiévales !
Prendre le château, enfoncer la porte ou capturer la perdrix, autant d’expressions lourdes de sens, qui présentent la femme comme la proie dont doit se saisir l’homme, par la force s’il le faut.
- DE LORRIS Guillaume et DE MEUN, Le Roman de la Rose, 1301-1400. Bibliothèque nationale de France. Département des manuscrits. Français 25526 .
- MAP Gautier, « C'est le livre de messire Lancelot du Lac, ouquel livre sont contenus tous les fais et les chevaleries dudit messire Lancelot, et la Queste du saint Graal faite par ledit messire Lancelot, le roy Artus, Galaad, le bon chevalier Tristan, Perceval, Palamedes et les autres compaignons de la Table ronde. » — 2e volume, 1401-1425.
- Le psautier de Gorleston, 1310-1324, British Library, MS 49622.
- Barthélemy l'Anglais, De Proprietatibus Rerum, Flandre, 3e-4e quart du 15e siècle. Traduit par Jean Corbichon, Paris, BNF, département des Manuscrits, Français 134, fol. 22v.
- LACROIX Paul, Moeurs, usages et costumes, au moyen-âge et à l'époque de la Renaissance (3e édition), Firmin-Didot frères, fils et Cie (Paris), 1873
- WIRTH Jean, Les marges à drôleries des manuscrits gothiques, 1250-1350. Droz,
- ROSSIAUD Jacques, Sexualités au Moyen-âge, Gisserot, 2015.
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